Rage de dents - Extraits

Extrait #1

- Bordel de merde Brianne, tu te fous de moi ?
- Arrête de toujours jurer comme ça Maeve, c’est vraiment pas élégant.
- Élégant mon cul. C’est ton Albert qu’est pas élégant, maugréai-je.
Elle me fusilla du regard. Mais lorsqu’elle vit que celui que je lui renvoyais n’était pas moins assassin, ni près de flancher, elle se recomposa un visage charmant, puis se tourna vers le fameux Albert.
- Maeve, voici Albert. Albert, c’est Maeve, dont je t’ai tellement parlé. Bon, excusez-moi, je dois aller aux toilettes.
Et aussi vite que ça, elle m’avait larguée avec cet inconnu sautillant. Merci Brianne. Sincèrement, merci.
- Salut Maeva, me dit-il, un peu gêné, en arrêtant de gigoter pour le coup.
- Maeve, corrigeai-je machinalement, habituée à l’erreur.
Bon. Albert n’avait pas l’air méchant. C’était sûrement une grande partie du problème.
Tout comme Elliot, il était vêtu d’une simple chemise blanche, par dessus des pantalons noirs. Je n’aurais pas été étonnée d’apprendre que c’étaient ceux du smoking qu’il portait à l’enterrement de son grand-père. En tout cas, à la différence d’Elliot, sur lui l’accoutrement semblait ridicule. Il était fluet – presque autant que moi, c’est dire – et avait un visage poupin, à cela près qu’il avait les joues creusées, presque rachitiques, et qu’elles étaient parsemées d’années d’ingratitudes, l’acné ayant laissé autant de petites cicatrices rougeâtres qu’il y avait de gens bourrés dans la boîte. Ses cheveux bruns, coupés courts, étaient arrangés en pic sur le sommet, et des amas de gel étaient visibles. La coiffure jurait avec l’air d’informaticien échappé d’un sous-sol que lui conféraient ses lunettes. Brianne s’était vraiment surpassée, sur ce coup-là.
- Brianne m’a beaucoup parlé de toi, cria-t-il pour couvrir la musique.
Tu m’étonnes, je suis sûre que tu sais tout, pensai-je. De mon heure de naissance à la couleur de mes sous-vêtements.
- Ah, me contentai-je de répondre.
Je n’avais pas signé pour être sympathique non plus. Brianne avait résilié le contrat de bonne conduite lorsque son envie pressante l’avait envoyée aux toilettes plus vite que l’éclair. J’espérais qu’elle était en train de s’y laver la langue avec du savon.

Extrait #2

Il était énorme, et c’était un petit mot. Il faisait largement plus de deux mètres. Sa peau était sombre, ses cheveux noirs, lisses et longs, attachés en queue de cheval. Vêtu d’un jeans – qui devait faire ma taille – et d’un marcel tendu à l’extrême, il avançait d’un pas lourd, semblant humer l’air.

Je sentais les battements de mon cœur ralentir à mesure que ma peur grandissait. Elle bourdonnait à mes oreilles, et lorsque j’ôtai discrètement mes chaussures à talon, je n’entendais plus aucun battement. Je ne sentais plus rien. Je venais de mourir de peur, au sens propre.

Le géant passa sous un lampadaire, et j’émis un hoquet de surprise en découvrant son visage. On aurait dit un guerrier indien, à la différence près que ce n’étaient pas des peintures de guerre qui ornaient son visage, mais des cicatrices. L’une était très épaisse et faisait toute la longueur de son visage, séparant son sourcil noir en deux portions égales au-dessus d’un œil qui semblait éteint.

J’eus l’impression qu’il m’avait entendue sur le champ, car il s’était tourné à peine le hoquet eut passé mes lèvres. J’arrêtai de respirer. S’il se retournait, j’aurais une fraction de seconde pour partir en courant dans la direction opposée en espérant rencontrer des gens. Et finalement la chance se présenta. Mr T se retourna et fit deux pas en avant. Je n’attendis pas une autre occasion.

Je m’élançai en avant, en direction de la boîte de nuit, refaisant tout le chemin que je venais de faire en sens inverse. Je courrais à m’en brûler les poumons, et mon cœur m’accompagnait dans la course. Lui qui avait été si silencieux quelques secondes auparavant faisait un boucan d’enfer. Une fois arrivée devant la boîte de nuit, je m’arrêtai devant la porte pour reprendre mon souffle. Mes yeux s’agitaient au rythme des battements, et chaque bouffée d’air me faisait souffrir. Lorsque je fis mine de rentrer, le videur m’arrêta.

- Si tu crois que tu vas entrer sans chaussures, petite…

- Je suis venue voir Jim, dis-je.

Et malgré la douleur que cela me provoqua, je lui fis mon sourire le plus charmant.

Extrait #3

J’étais totalement bloquée, et je ne pouvais rien faire. À côté de nous, les trois vampires étaient sur Lukas, pour ce que j’en voyais. Tout allait trop vite pour des yeux humains. Je voyais juste une masse informe, dont seul se détachait vraiment Roy grâce à la couleur de sa peau. Mon mobilier giclait dans tous les sens. Mon pauvre mobilier. J’arrivais juste à me rendre compte que Lukas leur donnait du fil à retordre, seul qu’il était contre trois. Mais il n’allait pas pouvoir prendre le temps de m’aider actuellement.

Je vis un des deux vampires bruns finir au sol en se tenant la gorge. Du sang s’en écoulait à grande vitesse. Il eut l’air d’étouffer pendant quelques secondes, durant lesquelles la masse informe en arrière fond ne s’arrêta pas. Puis sa gorge se referma sous mes yeux, comme par magie. Comme dans les films… Mais avant que j’aie eu le temps de vraiment m’amuser de cette pensée, Phil et Rickman m’encadraient.

- Salut les gars, dis-je d’une voix qui se voulait rassurée mais qui ne l’était franchement pas, tout en continuant à marteler la ceinture. Un de vous aurait la gentillesse de m’aider à me débarrasser de ce machin ? Je me fais mal aux poignets à force.

Je tentai une ébauche d’air innocent. Le petit large me regardait avec un sale sourire, il n’y avait pas d’autre mot. Vieux pervers lubrique, pensai-je, dégoûtée.

- Si je te détache, ce ne sera pas pour ça, dit le grand blond.

Super, deux pervers.

- Et j’ai un petit creux, dit l’imitation de Vinny. Est-ce que toi tu aurais la gentillesse de m’aider avec ça ?

Ses yeux brillaient d’une lueur que je n’avais pas envie d’identifier.

- Les mecs… On peut trouver un moyen de s’entendre, discuter tranquillement, y a sûrement moyen d’arranger les choses.

C’est ce que disait Jim. Mais avec Jim, ça fonctionnait. Soit je n’avais vraiment pas de chance, soit il me manquait trente centimètres et soixante kilos de persuasion.

- Bien sûr ma jolie, dit le petit. J’ai une très bonne idée de comment je vais arranger ma soif.

Il me sourit, toutes dents dehors, tel un prédateur, et la peur m’envahit. J’eus juste le temps de penser que Lukas ne me serait d’aucune utilité avant que le petit gros ne me fonce dessus, crocs en avant, et ne me broie la jugulaire.

Extrait #4

Je souris malgré moi, mais pas très longtemps. Le grand blond s’approcha, un sourire mauvais lui déchirant le visage, et se saisit de moi sans ménagement. La chaise se brisa sous sa poigne et je me retrouvai en l’air, les mains toujours attachées, mais le barreau de la chaise auquel la ceinture était attachée étant tombé dans l’élan puisque plus rien ne le retenait, j’arrivais à bouger les mains. Encore un petit effort et je pourrais me libérer.

Je faisais face à la porte, et je le vis à la seconde où il arriva. Une forme colossale, dont le visage était parcouru de cicatrices, qui portait une tête tranchée dans chaque main.

Tout se passa très vite.

Dès que l’indien eut fait un pas dans la pièce, je tombai au sol, le vampire blond ayant reçu un coup de tête. Le géant avait lancé une des deux qu’il tenait droit sur lui et n’avait pas manqué la cible. Un bruit de bris de verre retentit dans toute la pièce. Le temps que je me redresse, Geronimo avait lancée l’autre tête sur Lukas, qui était en train de se battre avec le brun qui le tenait à sa merci peu de temps auparavant. Roy avait disparu.

Je me mis à rudoyer ce qu’il me restait de liens sans demander mon reste. A peine me fus-je débarrassée de cette fichue ceinture que je me retournai, pour voir que le blond s’était relevé et avançait vers moi, tout comme le géant indien. A ma gauche, Lukas et son ami brun avaient repris une valse mortelle. En face de moi, le blond et le géant. J’étais encerclée. Je n’eus qu’une fraction de seconde pour réfléchir.

Je roulai vivement sur mon côté droit, en direction de mon sac à main, alors que j’entendais le blond se jeter à l'endroit où j’étais quelques secondes plus tôt. Avant que moi-même je n’aie eu le temps de comprendre quoi que ce soit, je me retournai, victorieuse, brandissant le spray au poivre droit devant moi, à l’aveuglette, sûre tout de même d’attraper le blond dans le jet monstrueux que j’envoyai. J’entendis – plus que ne vis – hurler l’indien. Il avait à moitié écrasé le blondinet en s’asseyant sur lui, et mon jet l’avait atteint droit dans les yeux. Et il n’avait vraiment, vraiment pas l’air content.

Oups ?

Le blond sourit méchamment. C’est la dernière chose que je vis clairement, mes yeux entrant en contact avec les vapeurs du spray. Pas pratique dans une pièce close. Je me mis à reculer en toussant, fesses au sol, mes mains me servant de radar. L’une d’elle entra en contact avec ce qu’elle identifia immédiatement comme une tête, tranchée. Je me retournai, et, à travers mes larmes, je vis une expression surprise sur un visage banal, sauf en cela qu’il possédait deux canines de taille inhabituelle.

L’air n’était plus respirable, il fallait ouvrir la fenêtre. En me retournant, je réalisai que le bruit de verre cassé que j’avais entendu tout à l’heure allait m’en empêcher. C’était sûrement par là que Roy était sorti, car elle était pulvérisée. L’air devrait devenir plus respirable, du moins l’espérai-je, car il ne serait pas possible d’ouvrir ailleurs. Enfin si, à la cuisine, mais je ne me voyais pas trop lancer un « pouce les gars, je vais juste ouvrir la fenêtre, j’ai les yeux qui piquent ». Pas quand le vampire blond et chanceux que j’avais raté tout à l’heure essayait d’enfoncer un bout du barreau de la chaise dans le grand frère de Pocahontas.

Extrait #5

Je me réveillai en sursaut.

Il faisait encore nuit noire, et un coup d’œil à mon réveil digital m’indiqua qu’il était 4h23. J’avais à peine dormi une heure. Génial. Et j’avais encore fait un de ces rêves bizarres. Les événements de la veille avaient dû me marquer plus que mon égo n’était prêt à le reconnaître. J’étais en nage, et aussi détendue qu’un garde de Buckingham Palace.

Je me laissai retomber sur mon oreiller en poussant un long soupir. Une douleur à ma tempe gauche me rappela les événements du soir précédant. Ce fichu Marc. Ce n'était peut-être pas une pensée très élégante, mais j’espérais sincèrement qu’il avait une commotion, et tout aussi sincèrement que ce n’était pas la couture de son jeans qui avait craqué.

Il fallait que j’essaie de me rendormir. Survivre à une journée en famille si j’avais un cocard, des cernes, et étais d’une sale humeur n’allait pas être faisable. Sans compter que, connaissant Elliot et ses faux airs de grand frère, il allait me sermonner et tenter de me donner une leçon, et qu’il ne serait pas là pour me soutenir moralement face aux questions de Walter, estimant – peut-être à juste titre – que ça me servirait d’exemple pour ne pas avoir envie de recommencer.

Au bout d’un moment, je dus bien me rendre à l’évidence. Impossible de dormir. Mon tour de garde n’était pas fini. Mon corps était raidi et mon esprit vagabondait plus vite que mon cerveau n’arrivait à suivre à cette heure indue. Je repensais à Marc, évidemment, mais en toile de fond, je n’arrivais pas à me défaire des images des rues d’une ville que je ne connaissais pas, qui n’existait probablement pas, et dont je rêvais depuis quelques jours déjà.

Ce qui était vraiment excitant dans ces rêves, c’est qu’il ne se passait rien. Rien du tout. Je me baladais dans des rues presque parfaitement désertes, en évitant les quelques passants qui venaient s’y aventurer. Je savais que je cherchais quelque chose, mais de toute évidence, je ne le trouvais pas. Pourtant je continuais à chercher, toutes les nuits, à la même heure, autour des 4h.

Cette nuit pourtant, je l’avais enfin trouvé. Et je l’avais pris en filature. Un homme, très grand et très mince, qui se faufilait dans les rues sombres aussi discrètement que je le faisais. Je ne voyais pas son visage. Tout ce que je voyais de lui était que, dans l’obscurité, ses cheveux étaient noirs comme le jais. Mais c’était lui, j’en étais sûre. Il ne n’était rien passé de plus. J’avais fini par me réveiller, comme toutes les nuits, après quelques minutes. Et rien de plus. Je me demandais ce qu’un psy en aurait pensé. Je me souvenais avoir entendu un étudiant de psycho dire que dans les rêves, on est tous les personnages à la fois. Même si il s’agit de quelqu’un que l’on connaît, cela représenterait une partie de nous qu’on voit dans la personne. Peut-être que j’étais en train de me chercher, tout simplement, et qu’après les événements avec Marc, j’avais commencé à trouver quelque chose. Qui dit que la violence ne résout rien ?

Sur cette pensée joyeuse, j’abandonnai l’idée de me rendormir de suite. Je me levai et me dirigeai d’un pas traînant vers la salle de bain. J’allumai la lumière et me postai devant le lavabo pour m’asperger le visage d’eau. Le contact du liquide glacé me ramena à la réalité. Plus d’allées sombres, juste mon visage tuméfié dans le miroir, qui jurait avec la banalité de ma salle de bain. La salle de bain épurée d’une fille normale, qui ne prend pas spécialement soin d’elle, mais qui ne se bat pas le vendredi soir.

Je détaillai mon reflet. De longs cheveux presque noirs et ondulés retombaient en masses informes sur mes épaules. Mes sourcils fins étaient figés en une expression fatiguée qui aurait fait fureur à une réunion des insomniaques anonymes. « Bonjour, je m’appelle Maeve, et je suis insomniaque », « Bonjour Maeve ». Ma bouche était tirée et mes lèvres, pourtant assez pleines, apparaissaient comme deux traits sous la lumière blafarde. Mes yeux verts aqueux avaient l’air plus transparents que jamais, et mon visage, qui respirait la joie de vivre nocturne, était ponctué d’un énorme cocard, violet clair. Bien joué Regan, pensai-je. Heureusement que je portais bien le violet.

Bienvenue

Marika Gallman

Bienvenue sur mon site et bonne visite !
                  - Marika

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